Histoire et violence
HLP 4e semestre : L'Humanité en question
Littérature
Gaudé, Cris
Dans le texte de Laurent Gaudé, Cris :

Impressions qui se dégage de l'évocation :
1) sentiment majeur de compassion pour le soldat-narrateur
2) horreur de la situation due à la déshumanisation générale des personnages

1) Ce qui suscite la compassion du lecteur c'est :
  • le sentiment de détresse créé par
        • le rythme saccadé du texte, surtout dans la première partie, produit par des phrases courtes, réduites à l'essentiel ou nominales
        • rythme qui peut mimer la marche des soldats, le halètement ou essoufflement (l. 7 "souffle coupé") de l'homme, la panique (l. 8 "terrifiés") voire la lassitude de voir toujours le même spectacle
        • le symbolisme du souffle coupé renvoie évidemment à la mort qui ne tient qu'à un souffle
  • le choix de la narration interne :
        • qui permet une identification plus rapide du lecteur au personnage
        • qui donne l'illusion d'avoir accès à l'intériorité du personnage mais en fait on se rend compte du vide intérieur que connaît ce "je"
  • La sidération du personnage :
        • ce vide est due à une sidération perceptible à travers le nombre de verbes de déplacement + répétition du verbe "marcher" qui donne l'impression d'un robot qui ne peut s'arrêter
        • d'autant plus qu'il marche à rebours des autres soldats, comme dans un mouvement pendulaire infini
        • le fait d'avoir obtenu une permission pourrait nous laisser croire qu'il a l'esprit plus libre pour penser, mais en fait, bien qu'il y ait la mention de ce verbe (l. 2 et 3, répétition de "je pense"), le lecteur a accès à deux bribes d"idées très fugaces et anecdotiques
  • la métamorphose du moi :
        • les verbes d'action s'effacent en partie dans la 2e partie au profit de verbes d'état
        • métaphore l. 13, répétée ligne suivante "Je suis le vieillard de la guerre", annoncée précédemment par le cplmt de temps "milliers d'années" :
                      • vieillissement prématuré du jeune soldat du au spectacle quotidien de l'horreur
                      • généralisation de la métaphore pour parler de toutes les guerres // allégorie de la Faucheuse
          • jusqu'à la déshumanisation totale l. 20 exprimée par la négation totale "je ne suis plus un homme"

2) L'horreur de la situation et la déshumanisation générale
  • dès le début du texte, opposition entre les pronoms qui renvoie les soldats à un statut de viande :
        • "je" fait contraste avec les "on" lignes 1 et 2 => pro,nom indéfini qui ne donne pas d'existence aux soldats qui ne partent pas en permission, comme s'ils étaient déjà morts, en tous cas, en sursis
        • puis contraste dans la seconde partie avec les "ils" (" les nouveaux") présentés à travers ce pronom comme une masse indistincte => chair à canon
  • étonnement du narrateur face au nombre => champ lexical du nombre dans la 2e partie, qui vient renforcer le mouvement pendulaire comme si la guerre pouvait durer éternellement à travers l'afflux incessant de nouveaux jeunes soldats => aucune vie ne compte réellement, toutes se valent
  • candeur des jeunes soldats fraichement arrivés qui ne savent pas ce qui les attend,
        • perceptible à travers les questions l. 10 à 13
        • renforcement de la dimension tragique du texte puisque les personnages n'ont pas conscience qu'ils vont à leur mort et ne peuvent de plus pas y échapper, ce que sait parfaitement le lecteur (ironie tragique)
        • anaphore de "attendant" à la fin du texte qui renforce la notion de guerre interminable et surtout de guerre insensée
  • donc déshumanisation liée
        • pour le narrateur à son statut de survivant robotisé par l'horreur
        • pour les autres soldats à leur nombre et à leur indistinction